M 0012 - Michna pour lundi : traité Chabate, Chapitre 1
Première partie : introduction et liste des questions abordées
Quelques interdits concernant la veille de Chabate
(1) Introduction ; Positionnement du traité Chabate :
Les michnayote du lundi ont été choisies par les auteurs du ‘Hok-lé-Israël, dans le Sédér Mo’éd (« le Temps fixé »), qui expose les lois relatives au Chabate, aux fêtes et aux jours de jeûne. Il comprend 12 traités, 88 chapitres et 681 michnayote.
Chabate, est le premier traité de ce Séder. Ses 139 michnayote, réparties en 24 chapitres, abordent essentiellement les travaux interdits le jour et la veille de Chabate, l’allumage des bougies, et certaines autres lois relatives à l’observance du Chabate. Le Talmud de Babylone y inclut quelques pages sur la fête de ‘Hanouca.
Il est à noter que les trente-neuf travaux interdits le Chabate sont ceux exécutés par les Hébreux lors de la construction du Michkane (Tabernacle).
Ainsi donc, chaque lundi, nous aborderons un chapitre du traité Chabate, et ce jusqu’à Parachat Vayikra. A partir de Parachat Tsav, nous passerons au traité suivant : ‘Erouvine.
(2) Les questions abordées dans le chapitre 1 :
Première michna : Peut-on transporter, le Chabate des objets d’un domaine privé à un domaine public et vice-versa ?
Deuxième michna : Quelles activités sont interdites, chaque jour, avant l’office de Min’ha ?
Troisième michna : Quelles les activités interdites avant Chabate, de peur d’en arriver à le transgresser ?
Quatrième michna : Quelles règles conformes à l’Ecole de Chamaï ont été adoptées à la majorité ?
Cinquième et sixième michna : Les objets d’une personne doivent-ils être au repos le Chabate au même titre que les animaux domestiques ?
Septième michna : Quelles missions ne peuvent être données à un non Juif avant Chabate, pour ne pas donner l’impression de le faire travailler après la tombée de la nuit ?
Huitième et neuvième michna : Le vendredi, peut-on faire exécuter un travail par un non Juif qui n’aura pas le temps matériel de le terminer avant Chabate ?
Dixième et onzième michna : Est-on autorisé à commencer la cuisson d’un mets peu avant Chabate ? La même règle s’applique-t-elle pour la cuisson de l’agneau pascal ?
Deuxième partie : Exposé du chapitre inspiré du commentaire du Kéhati*
Première michna : La Tora interdit de transporter un objet du domaine public au domaine privé ou vice versa. Ce travail défendu comprend deux étapes essentielles : prendre un objet qui était posé dans un domaine (« ‘Akira ») et le déposer (« Hana’ha ») dans un autre domaine. Celui qui accomplit seulement la « ‘Akira » ou la « Hana’ha » transgresse un interdit rabbinique. D’où l’enseignement de la michna :
Celui qui est à l’intérieur, c’est-à-dire dans le domaine privé, transgresse un interdit de la Tora dans deux cas et un interdit rabbinique dans deux autres situations De même, celui qui se trouve à l’extérieur, dans le domaine public, enfreint un interdit de la Tora dans deux cas différents et un interdit rabbinique dans deux autres situations.
Comment cela ? Prenons l’exemple d’un pauvre qui se tient, le Chabate, à l’extérieur (domaine public) et qui veut recevoir quelque chose d’un maître de maison se trouvant à l’intérieur (domaine privé).
a. Si le pauvre tend la main vers l’intérieur et dépose un objet dans la main du propriétaire, ou en retire un objet et le dépose à l’extérieur, il est coupable d’avoir transgressé un interdit de la Tora, puisqu’il a effectué la ‘Akira et la Ana’ha – et le propriétaire est innocent même aux yeux de la loi rabbinique car il n’a rien fait.
b. Si le propriétaire tend la main vers l’extérieur et remet un objet dans celle du pauvre, ou en retire un objet et le dépose à l’intérieur, c’est lui qui est coupable, puisqu’il a fait la ‘Akira et la Ana’ha. En l’occurrence, le pauvre est innocent même selon la loi rabbinique, car il est resté passif.
c. Si le pauvre tend la main vers l’intérieur et le propriétaire en retire un objet, ou y remet un objet que le pauvre dépose à l’extérieur, les deux sont innocents d’après la Tora, chacun n’ayant fait que l’un des deux gestes constitutifs de l’interdit. Toutefois, ils ont transgressé l’un et l’autre un interdit rabbinique.
d. Il en va de même si le propriétaire tend la main et le pauvre en retire un objet qu’il dépose à l’extérieur, ou si le pauvre remet un objet dans la main du propriétaire qui le dépose à l’intérieur. ((>))
Deuxième michna : Il est interdit, même en semaine, d’entreprendre certaines activités à l’approche de l’heure de Min’ha *(c’est-à-dire de Min’ha Guédola*, en début d’après-midi) de crainte que, à la suite d’un imprévu, elles se prolongent au-delà de l’heure limite de cette prière (au coucher du soleil).
Ainsi, peu avant l’heure de Min’ha, on ne doit pas s’asseoir chez le coiffeur sans avoir récité la ‘Amida, ni entrer aux bains publics ni dans une tannerie, ni se mettre à table, ni entamer un jugement. Toutefois, si l’on a commencé l’une de ces activités, on n’est pas tenu de les interrompre.
Les Sages qui se consacrent à l’étude de la Tora doivent s’interrompre pour réciter le Chéma’ dans les délais réglementaires, mais pas pour la ‘Amida, qui n’a pas de temps fixe d’après la Tora.
Troisième michna : A l’approche du vendredi soir, le tailleur ne doit pas sortir dans la rue avec une aiguille accrochée à son vêtement de peur que, par oubli, il continue à la porter après la nuit. De même, le scribe ne doit pas sortir avec sa plume.
Le Chabate même, il ne faut pas examiner ses vêtements pour enlever les mites éventuelles, ni lire à la lumière d’une lampe à huile, de peur qu’on en vienne à la pencher et à transgresser ainsi l’interdiction « de brûler » en attisant la flamme. En vérité, il a été établi que le bedeau servant aussi de maître d’école peut regarder, à la lumière d’une lampe, où se trouve dans la Tora le passage qu’il veut faire lire à ses élèves, mais il ne doit pas lire lui-même le passage.
De même, il est interdit à un homme de manger à la même table que sa femme lorsqu’elle lui est défendue en raison d’un flux de trois jours consécutifs (« Zava »), car ils pourraient en arriver à s’unir ensemble malgré la grave interdiction de la Tora.
Quatrième michna : Les lois enseignées dans la michna précédente font partie des dix-huit interdictions prononcées par les Sages dans la chambre de ‘Hananya ben ‘Hizkiya ben Gouryone, le chef spirituel de la génération, à qui ils étaient venus rendre visite. Ce jour-là, on procéda à un vote pour statuer sur certains points de Halakha. Les disciples de l’Ecole de Chamaï étant plus nombreux que ceux de l’Ecole de Hillel au sein de cette noble assistance, dix-huit décisions sévères furent prononcées conformément à l’avis de la première Ecole.
Les quatre michnayote suivantes présentent différentes controverses entre ces deux Ecoles :
Cinquième michna : Contrairement à l’Ecole de Hillel, celle de Chamaï interdit, la veille de Chabate, de mettre à tremper des ingrédients pour l’encre, des épices ou des plantes pour fourrage, à moins que leur trempage puisse se terminer avant le commencement du Chabate. En effet, d’après cette Ecole, les objets d’une personne doivent cesser, eux aussi, de « travailler » le Chabate.
Sixième michna : Selon l’Ecole de Chamaï, des touffes de lin ne doivent pas être mises au four le vendredi, à moins que leur eau ait le temps de s’évaporer le jour même, avant le commencement du Chabate. De même, on ne peut mettre de la laine dans un chaudron à teinture que si celle-ci va s’imprégner le jour même sur le tissu. L’Ecole de Hillel permet de commencer ces deux travaux le vendredi pour qu’ils se terminent d’eux-mêmes pendant Chabate, à condition de prendre des précautions pour que l’intéressé n’en vienne pas à y prendre une part active durant le jour du repos – en attisant, par exemple, les braises sous le chaudron.
De même, l’Ecole de Chamaï interdit de tendre, le vendredi, des pièges et filets aux bêtes sauvages, aux oiseaux ou aux poissons, à moins que ces animaux puissent être pris avant la nuit – alors que l’Ecole de Hillel le permet dans tous les cas.
Septième michna : Contrairement à l’Ecole de Hillel, celle de Chamaï permet de vendre, le vendredi, de la marchandise à un non Juif, de l’aider à charger sa bête ou à mettre un fardeau sur ses épaules seulement s’il se rend dans un endroit proche, qu’il pourra atteindre pendant la nuit.
Huitième michna : Selon l’Ecole de Chamaï, on ne peut donner, le vendredi, des peaux à un tanneur non-juif ni du linge à un blanchisseur non-juif que s’ils ont le temps matériel de finir leur travail avant Chabate. D’après l’Ecole de Hillel, on peut leur remettre les peaux ou le linge tant que le soleil ne s’est pas couché.
Neuvième michna : A ce propos, Rabane Chim’one ben Gamliel atteste : Chez mon père, on était plus sévère que l’Ecole de Hillel sur ce point, car le linge blanc, difficile à nettoyer, était remis à un blanchisseur non-Juif trois jours avant Chabate.
Les deux Ecoles s’accordent à permettre de charger les presses à huile de poutres et le cuvier avec des cylindres de compression peu avant Chabate, bien que l’extraction de l’huile s’achèvera après la tombée de la nuit. En l’occurrence, l’Ecole de Chamaï se range à l’avis permissif de ses opposants, parce que celui qui le ferait le Chabate ne serait pas coupable d’après la loi biblique, car ces opérations ne font qu’accélérer l’extraction de l’huile.
Dixième michna : Même l’Ecole de Hillel admet que, le vendredi, on a le droit de mettre à rôtir de la viande, un oignon ou un œuf seulement s’ils vont être rôtis au tiers et donc mangeables avant le commencement du Chabate ; autrement, on craint que l’intéressé n’attise les braises.
De même, un premier Sage, anonyme, ne permet pas de mettre du pain au four vers le crépuscule, ni du gâteau sur des braises à moins qu’une légère croûte ait le temps de se former avant Chabate. Selon Rabbi Eli’ézer, il suffit que cette croûte puisse se former sur la partie inférieure du gâteau, collée aux parois du four.
Onzième michna : Cependant, cette règle comporte des exceptions :
En effet, si la veille de Pessa’h tombe un vendredi, on peut descendre l’agneau pascal dans un four à l’approche de la nuit, sans craindre qu’on en vienne à attiser les braises, parce que ceux qui se sont « comptés » sur le sacrifice pascal en vue de le manger ensemble dans la soirée sont tenus pour très scrupuleux dans l’accomplissement des commandements de la Tora.
De même, les Kohanim étant connus également pour leur zèle dans la pratique religieuse, on leur permet d’alimenter, à l’approche de la nuit, le feu qui brûle en permanence dans la Chambre du Foyer pour qu’ils puissent se réchauffer – car ils sont obligés de marcher pieds nus sur le sol froid de la ‘Azara.
Hors du Temple, un premier Sage, anonyme, ne permet d’ajouter du bois dans un foyer le vendredi après-midi que si le feu a encore le temps de prendre sur la plus grande partie du bois avant Chabate. Rabbi Yéhouda précise : Si on utilise du charbon comme combustible, il suffit qu’une infime partie soit avivée avant Chabate car, dès lors, le feu va continuer à brûler normalement sans qu’on ait besoin de l’attiser.
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