M0548 – Michna pour mardi :
traité Yébamote, chapitre 12
Le rituel de la «‘Halitsa»*
(1) Rappels de définitions
- «Yiboum*» : Un frère d’un homme mort sans enfant doit épouser sa belle-sœur devenue veuve (Dévarim 25,5-6) ; s’il refuse, elle ne peut se remarier avec quelqu’un d’autre sans procéder à la cérémonie du « déchaussement » («‘Halitsa»), décrite ainsi par la Tora (ibid. 25,7-10) : « Si l’homme ne veut pas épouser sa belle-sœur, celle-ci viendra à la porte (du tribunal), vers les anciens, et dira : “Mon beau-frère refuse de relever en Israël le nom de son frère, il ne veut pas m’accorder le lévirat.” Les anciens de sa ville le manderont et lui parleront ; et lui, debout, dira : “Je ne veux pas l’épouser !” Alors sa belle-sœur s’avancera vers lui à la vue des anciens, lui ôtera sa chaussure d’au-dessus de son pied, crachera devant lui et dira à haute voix : “Ainsi sera fait pour l’homme qui ne veut pas édifier la maison de son frère !” Et il sera appelé en Israël : « La maison du Déchaussé ! »
(2) Les questions traitées dans le douzième chapitre sont :
Première et deuxième michna : Devant combien de juges la «‘Halitsa» doit-elle se dérouler ? Avec quelle chaussure ? Le jour ou la nuit ? Au pied gauche ou au pied droit ?
Troisième michna : La «‘Halitsa» est-elle valable si la femme n’a pas effectué l’un des trois actes exigés par la Tora au cours de ce cérémonial, à savoir : le déchaussement lui-même, le crachat et les déclarations qu’elles devaient faire devant le tribunal ?
Quatrième michna : La «‘Halitsa» est-elle valable si elle a été effectuée par une sourde-muette ou une mineure, ou si le beau-frère était sourd-muet ou mineur ?
Cinquième michna : La «‘Halitsa» est-elle valable si elle a été effectuée en présence de deux juges, ou de trois mais dont l’un était un proche parent des intéressés ou disqualifié pour une autre raison ?
Sixième michna : Quel est le cérémonial de la «‘Halitsa» dans tous ses détails ?
(2) Exposé du chapitre 12 du traité Yébamote :
Première michna : La cérémonie de la «‘Halitsa» doit se dérouler devant trois juges sachant dicter aux intéressés les déclarations prescrites par la Tora, fût-ce trois simples Israélites n’ayant pas reçu l’ordination rabbinique.
Une chaussure ordinaire en cuir fait l’affaire, mais pas celle qui est en tissu.
Il faut utiliser une chaussure à talon, dont la bride est attachée en dessous du genou, mais pas plus haut, car il est écrit : « Elle lui ôtera sa chaussure d’au-dessus du pied ». ((>))
Deuxième michna :
La «‘Halitsa» est valable a posteriori si elle a été faite avec une chaussure qui n’appartenait pas au beau-frère, avec une chaussure en bois, ou au pied droit, comme il fallait, mais avec une chaussure gauche.
A priori il faut une chaussure adaptée au pied du beau-frère ; si elle est un peu trop grande pour lui mais pas au point de tomber du pied, ou si elle est un peu trop petite mais elle recouvre la majeure partie du pied, la «‘Halitsa» est valable.
A priori il faut procéder à la «‘Halitsa» pendant la journée ; si elle a été faite la nuit, elle est valable d’après un premier Sage, anonyme, mais pas d’après Rabbi Eli’ézer.
Selon un premier Sage, anonyme, la «‘Halitsa» n’est pas valable si elle a été faite au pied gauche du beau-frère. En effet, à propos de celui qui se purifie d’une affection lépreuse (voir Vayikra 14.14), la Tora parle de « son pied droit » ; par une analogie sémantique, on déduit que « son pied », écrit au sujet du beau-frère, c’est le droit. Rabbi Eli’ézer, lui, valide la «‘Halitsa» faite au pied gauche, car il n’avait pas appris cette analogie sémantique, transmise de maître à élève.
Troisième michna :
Dès lors que l’intéressée a déchaussé son beau-frère et a craché devant lui, la «‘Halitsa» est valable même si elle n’a pas fait les déclarations prescrites par la Tora. En revanche, la «‘Halitsa» est nulle et non avenue si la femme n’a pas déchaussé son beau-frère, même si elle a craché devant lui et fait les déclarations requises. Si elle a déchaussé son beau-frère et a fait les déclarations voulues, mais elle n’a pas craché devant lui, la «‘Halitsa» est valable d’après Rabbi ‘Akiva, mais pas d’après Rabbi Eli’ézer.
Selon ce dernier, le verset « Ainsi sera fait pour l’homme qui ne veut pas… » laisse entendre que les actes entrant dans le rituel de la « ‘Halitsa » – c’est-à-dire le déchaussement et le fait de cracher – sont indispensables.
Mais Rabbi ‘Akiva lui dit : Veux-tu réellement apporter une preuve de ce verset ? Pourtant les mots « pour l’homme… » laissent entendre que seul le déchaussement effectué sur le corps de « l’homme » est indispensable, mais pas le fait de cracher devant lui.
Quatrième michna :
La «‘Halitsa» faite à un beau-frère sourd-muet (non rééduqué et considéré ipso facto comme un arriéré mental) ou mineur, ou par une belle-sœur sourde-muette n’est pas valable. Une belle-sœur qui a procédé à la «‘Halitsa» alors qu’elle était encore mineure (moins de douze ans révolus) doit recommencer une fois majeure ; la «‘Halitsa» effectuée avant sa majorité religieuse est nulle et non avenue.
Cinquième michna :
Un premier Sage, anonyme, invalide la «‘Halitsa» si elle a été effectuée devant un tribunal de deux hommes, ou devant trois dont l’un était disqualifié comme témoin et comme juge pour cause de parenté avec l’un des intéressés ou pour une autre raison. En revanche, Rabbi Chim’one et Rabbi Yo’hanane le Cordonnier la valident a posteriori.
Cette opinion est confortée par le témoignage suivant : Un jour, une belle-sœur fit la «‘Halitsa» à son beau-frère en prison, alors que deux témoins voyaient la scène du dehors. Lorsqu’on soumit le cas à Rabbi ‘Akiva – qui se trouvait dans la même prison – il valida la «‘Halitsa».
Sixième michna :
Voici le cérémonial de la «‘Halitsa» d’après un premier Sage, anonyme : le beau-frère se présente avec sa belle-sœur au tribunal qui lui donne des conseils appropriés – notamment, d’opter pour la «‘Halitsa» et de renoncer au lévirat s’il y a une trop grande différence d’âge entre les deux – comme le laisse entendre le verset (cité dans l’introduction) : « Les anciens le manderont et lui parleront » – autrement dit, ils lui adresseront des paroles qui lui sont appropriées. Elle déclare (ibid.) : « Mon beau-frère refuse de relever en Israël le nom de son frère, il ne veut pas m’accorder le lévirat » et lui, il dit : « Je ne veux pas l’épouser ! » L’un et l’autre font ces déclarations en hébreu. « Alors sa belle-sœur s’avancera vers lui à la vue des anciens, lui ôtera sa chaussure d’au-dessus de son pied et crachera devant lui » – il faut que le crachat soit bien visible par les juges.
« Et elle dira à haute voix : “Ainsi sera fait pour l’homme qui ne veut pas édifier la maison de son frère !” – sans plus ; d’après cette première opinion, la déclaration de la femme s’arrête à ce verset.
En revanche, lors d’une «‘Halitsa» qui s’est déroulée sous le chêne du village d’Etam, Rabbi Horkinos fit dire aussi à la belle-sœur le dernier verset du passage : « Et il sera appelé en Israël : “La maison du Déchaussé” », et cet usage fut adopté par la suite.
Selon un premier Sage, anonyme, seuls les juges, et non les élèves présents à cette cérémonie, répètent après elle, en appelant le beau-frère : « Le Déchaussé ». D ‘après Rabbi Yéhouda, tous les assistants doivent le dire à trois reprises.
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